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A la rencontre de nos entrepreneures

« Entreprendre, c’est aller à la rencontre de sa vie. » Entretien avec Neuly ABIALA, Présidente de l’association ILE OBIRIN

Les femmes sont les piliers de l’éclosion entrepreneuriale. Au Bénin depuis quelques années elles ne cessent de faire parler d’elles. Neuly Abiala présidente de l’Association Ilé Obirin est l’une de ces femmes dont le parcours peut être inspirant. 

Et si vous vous présentiez à nos lectrices ? 

Je suis Neuly Abiala, coach et entrepreneure spécialisée dans l’entrepreneuriat agricole et agroalimentaire. Anciennement consultante internationale en management, je suis actuellement présidente de l’Association Ilé Obirin. Forte de mon parcours, j’ai créé cette association pour soutenir spécifiquement les femmes dans la conciliation vie privée-vie professionnelle et les défis de l’entrepreneuriat.

C’est un noble engagement, dites-nous-en un peu plus sur les motivations de la création de Ilé Obirin !       

(Sourire) Premièrement c’est pour sortir les femmes de l’isolement car entreprendre seule peut être une catastrophe ! Vous n’irez pas ou bout de votre projet. L’entrepreneuriat est un chemin solitaire, où il est difficile de trouver une compréhension extérieure. Le projet que vous portez absorbe entièrement votre attention, vous être à peine disponible et les personnes autour de vous peuvent penser que vous les délaisser au profit de votre initiative.


Deuxièmement, la plupart des gens vous associent à un domaine spécifique. Lorsqu’ils voient que vous explorez une nouvelle voie, cela suscite des inquiétudes, car cela vous éloigne de votre zone de confort. Ils craignent que votre changement d’orientation compromette le confort et la sécurité qu’ils tiraient de votre présence. En résumé, la famille et l’environnement ne sont pas toujours des soutiens immédiats, d’où l’importance de s’entourer de pairs partageant la même vision, que l’on trouve souvent dans le monde professionnel.

C’est ainsi que j’ai pris l’initiative de créer une association rassemblant des individus partageant les mêmes problèmes, défis et objectifs. L’entrepreneuriat est semé d’embûches, mais certains ont déjà surmonté des défis. En fréquentant ces personnes expérimentées, on peut trouver motivation, astuces et encouragement pour aller de l’avant. Ces raisons fondamentales ont motivé la création de cet espace où les femmes peuvent partager leurs expériences.

Que veut dire « Ilé Obirin » ?  

(Rire) Ilé Obirin ! En réalité j’ai écrit ce projet en 2020 et l’ai lancé en septembre 2020. J’ai obtenu l’autorisation pour l’inaugurer quand la crise de la Covid-19 est arrivée et puis on a interdit les rassemblements. Mais rien ne m’a arrêté (moment nostalgique). On a fait l’inauguration complète en ligne avec les mêmes invités, les mêmes discours. Courant cette période, il faut souligner qu’on n’a pas pu se voir pour travailler. De plus, face aux difficultés rencontrées, j’ai fermé mon entreprise sise à Bohicon. En 2022, j’ai compris qu’on avait grandi et donc il fallait prendre un local. Pour revenir à votre question, je dirai d’abord que je suis Nago et je suis en train de promouvoir le local et je voudrais demander à chacun d’être fier de sa culture. En nago « Ilé » signifie « Maison » et « Obirin » Femme. D’où Ilé Obirin « Maison de la femme ».  

Quelle définition donnez-vous à l’entrepreneuriat ? 

Entreprendre ce n’est pas forcément aller travailler à son propre compte. On entreprend certes un projet mais on entreprend sur toute sa vie. Donc il faut pouvoir réaliser tous les rêves et les gros challenges qui tiennent à cœur avant de quitter ce monde. Il faut laisser sa trace et il faut être cité avec son nom. Pour moi je le répète, l’entreprendre, c’est aller à la rencontre de sa vie. 

Pensez-vous que le climat économique est favorable aux femmes qui veulent  entreprendre ?  

Le climat économique, je dirai oui ! Et d’ailleurs tous les autres secteurs puisque rien n’est encore fait chez nous. Il y a encore tellement de choses à construire. Tout est encore vierge chez nous et les opportunités sont énormes. Donc c’est le terrain idéal. Parce que quand tout est fait et que le cadre est posé, vous n’avez pas vraiment de marge de manœuvre. Vous suivez ce qui est mis en place, les règlementations, le rythme mais les gens se plaignent.

 Les femmes doivent créer, elles doivent innover dans tous les domaines sans limites.

A quelles difficultés, selon vous, les entrepreneures sont-elles confrontées ?

Les difficultés sont nombreuses. La première déjà est de pouvoir présenter son idée aux gens parce que quand vous présentez le projet, ils vous diront : intéressant mais est-ce que ça va marcher ? Intéressant mais est-ce que tu penses qu’au Bénin ça fonctionnera ? Donc pour moi il faut d’abord avoir confiance en soi. Il faut être capable de présenter son projet à dix personnes différentes et de manières différentes et que chacun y trouve son intérêt. La deuxième difficulté relève de la conciliation entre la vie privée, la vie conjugale, la vie sociale et la vie professionnelle. Vous savez , les femmes pour maintenir le cap, doivent se battre deux fois plus que les hommes si elles veulent être à leur niveau et tous ces facteurs peuvent être parfois difficiles à mettre ensemble. L’autre difficulté, c’est le physique. Les femmes de manière générale ont moins de force physique que les hommes dans certains domaines mais nous avons une plus grande force morale. La femme est conçue pour tout supporter.     

Vous êtes donc convaincue que les femmes doivent et peuvent entreprendre malgré les difficultés. 

Ah oui, il le faut. C’est même un devoir pour une femme d’entreprendre parce que c’est la femme qui montre le chemin, c’est elle qui éduque les enfants. Donc si la femme aujourd’hui ne décide pas de donner du sens à sa vie et ne décide pas de réaliser les rêves qui sont les siens, elle ne peut pas apprendre à un enfant à rêver, elle ne peut pas apprendre à un enfant à donner du sens à sa vie. Et si la femme ne contribue pas à développer le monde et préserver la vie qu’elle-même donne, la vie finira par disparaître. Donc, je trouve que c’est une obligation pour la femme et toutes les femmes d’entreprendre. 

Quels sont les obstacles que vous avez personnellement rencontrés à vos débuts ? Et comment les avez-vous surmontés ? 

Si on part du principe selon lequel l’entrepreneuriat est une vie d’obstacle, qu’on accepte qu’on aura des obstacles et qu’on en aura beaucoup, c’est déjà une victoire puisqu’on est déjà psychologiquement préparé. L’imprévu ne fera pas peur. On n’aura pas peur de prendre des risques puisqu’on est conscient que c’est ça l’entrepreneuriat. Mais la plupart des gens viennent à l’entrepreneuriat à cause de la façon dont on présente l’entrepreneuriat : comme la porte de sortie, un El Dorado et être à son propre compte, c’est la liberté et la richesse. Bien que cela soit vrai c’est d’abord des années d’investissement, ça peut prendre 5 ans, 10 ans et même 20 ans. Pour ce qui me concerne, je dirai simplement que je fractionne tout. Quand je vois arriver la difficulté ou le challenge, je dis « Let’s go ». Pour les impôts j’ai toujours adopté la méthode de la fraction puisque comme on le dit : personne ne peut avaler un éléphant d’un seul coup. Aussi, ce que j’ai pu comprendre c’est que le manque d’information nous fait passer à côté de beaucoup de choses. Les entrepreneurs doivent aller à la quête de l’information pour ne pas être surpris au bout du compte.  

Selon-vous le gouvernement béninois arrive-t-il à accompagner les femmes entrepreneurs comme cela se doit ?

Aujourd’hui ils font de leur mieux. Quand vous voyez les programmes de facilitation à l’entrepreneuriat c’est beaucoup plus centré sur les femmes parce qu’ils ont compris que le pouvoir économique est dans la main de la femme.  Maintenant, il revient aux femmes de se structurer, se professionnaliser et faire des efforts pour porter les choses à un certain niveau pour qu’elles puissent avoir une voix. 

Actuellement, des efforts considérables sont déployés. Les programmes de soutien à l’entrepreneuriat se concentrent davantage sur les femmes, parce qu’ils ont compris que le pouvoir économique réside entre leurs mains. Aussi, il incombe aux femmes de s’organiser, de professionnaliser leurs activités et de faire les efforts nécessaires pour élever leur niveau, pour ainsi faire entendre leur voix Aujourd’hui nous sommes des entrepreneurs mais est-ce que le statut d’entrepreneur est reconnu ? Je ne dirai pas oui parce qu’on est un entrepreneur mais avec un registre de commerce. Pas avec une carte d’entrepreneur mais avec une carte de commerçant. 

Au bout de cet entretien, il nous semble découvrir en vous une femme forte et déterminée, complétez avec deux mots qui vous caractérisent.

Neuly Abiala c’est une passionnée tout simplement (Rire, émotion). Moi, je suis très panafricaniste mais il a fallu que je sorte de l’Afrique pour aimer l’Afrique.

Votre mot de la fin

Aujourd’hui il ne faut pas compter sur les autres pour nous motiver. Le seul moyen d’y arriver c’est de comprendre qu’on est la seule personne sur qui on peut compter dans l’entrepreneuriat. L’élément sur lequel vous pouvez compter c’est vous-même. Donc investissez en vous, investissez sur vous, croyez-en vous. Aux femmes je dirai qu’il faut laisser sa trace.   

Merci pour ce moment !          

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